Je suis venue, à bout de souffle, de cette lecture incroyablement percutante…
Et pourtant peu de choses sont dites, l’auteur économise les mots, il n’a pas besoin de plus pour nous faire ressentir l’urgence, la brutalité.
L’énergie est dans les mots, des phrases courtes, posées là sans aucune espèce de pathos.
Le lecteur est jeté dans le texte, il ne peut que suivre (parfois douloureusement), pas de temps pour les questions, la réflexion.
Mais ce lecteur n’est pas léthargique pour autant : c’est lui qui « assemble », qui met en place toutes les pièces pour composer le puzzle.
L’auteur Matthieu Zaccagna travaille à la production de concerts à la Cité de la musique-Philharmonie de Paris, je suis persuadée que le rythme vient de là, la musique a très à voir avec ce texte, elle s’impose dans ma tête au pas du coureur.
Et pourtant ce n’est pas un roman expéditif, c’est un premier roman furieusement remarquable aux Éditions Noir sur blanc !
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𝗥𝗲́𝘀𝘂𝗺𝗲́ : « Courir déterminé, en un bloc solide, résistant. Se faire violence, serrer les dents, plisser les yeux, broyer l’asphalte. Courir vite, sentir la vie, maintenir l’urgence, ne jamais ralentir, jamais faiblir. Respirer fort, mécaniquement, trois inspirations, trois expirations, toujours, même dans les montées. Sentir qu’on brûle, qu’on arrache cette chose, qu’on tient bien là, doigts moites, mains tremblantes. Cette chose qu’on serre, qu’on use, qu’on épuise, ce corps qu’on purge, que diable peut-il contenir pour qu’on l’éprouve ainsi ? Courir avec méfiance, avec défiance, sans compromis, sans concession, slalomer entre les voitures, les piétons, les deux-roues, les laisser derrière, tous. S’échapper, partir d’ici, partir de soi. J’avance dans les quartiers nord de la ville. Mes cuisses sont en vrac. Mes genoux, pareil. Je ne m’arrête pas. J’abîme la douleur. Dans l’aube naissante, la brume se dissipe sur l’eau du canal. J’ignore combien de temps je vais pouvoir tenir comme ça. »