Sans valeur, Gaëlle Obiégly

Sans valeur, Gaëlle Obiégly

Dans la collection « littérature intérieure » de Bayard, j’ai pioché ce petit livre à la belle couleur orangée.
Quelle valeur pourrais-je bien lui attribuer ? Difficile à dire… Doit-on se référer au prix ou aux sentiments que cette lecture m’a procurée ?

La valeur des choses, c’est précisément sur ce terrain complexe, de l’ordre de l’intime, que Gaëlle Obiégly nous entraîne.
Un sujet à la portée philosophique insoupçonnée…

Par deux fois j’ai dû me séparer d’une grande quantité d’objets qui représentaient des souvenirs « importants » de ma vie passée. Des séparations subies qui n’ont fait qu’alimenter le sentiment de perte que je ressentais. J’ai dû trier quelques bricoles à la va-vite qui constituent, aujourd’hui encore, la majorité de ces « souvenirs-trésors » (des livres, des disques, quelques bricoles sans aucune valeur si ce n’est que je les avais achetés gamine pour les offrir à ma mère…).
Comment déterminer la valeur d’une de ces choses ?
Je vous avoue que je n’ai pas eu le temps de me poser la question (les livres étaient une évidence, mais je n’ai sauvé qu’une partie de ma modeste collection d’adolescente…).
Ces objets qu’on laisse derrière soi, parfois, j’y pense (j’aurais voulu les donner à un proche dans l’idée d’une espèce de transmission), ce sont les souvenirs auxquels ils se rattachent qui provoquent une forme de manque impossible à combler puisque l’objet n’existe plus.

Ainsi, le personnage de Gaëlle Obiégly se prend presque d’amour pour un petit tas d’ordures délaissé sur un trottoir. Elle tente bien de se raisonner un peu, mais elle finit quand même par le ramener chez elle alors qu’elle doit elle-même procéder à un tri puisqu’elle est sur le point de déménager.
Que contient-il ? Qu’est-ce qui provoque ces sentiments exacerbés et les actions irrationnelles de la narratrice ?
Ce tas d’ordures n’a aucun rapport avec elle, aucun souvenir ne semble s’y rattacher, du moins a priori…

Une écriture fine, au plus juste et un livre-objet qui n’en finit plus de nous interpeller sur notre rapport aux choses et le classement presque inconscient que l’on fait selon l’importance qu’on leur attribue (doit-on l’archiver ou le jeter ?).

Retrouvez plus d’infos sur le site de l’éditeur

  • Résumé :

« Il est arrivé, à l’automne 2022, qu’un petit tas d’ordures suscite mon attention au point que je m’agenouille sur le trottoir pour les considérer. En vue d’un déménagement dont l’échéance approchait, l’essentiel de mon temps était alors occupé au tri et à l’empaquetage de mes affaires. Triant laborieusement, j’ai passé plusieurs mois à discriminer ce qui a de la valeur et ce qui ne vaut rien. D’un côté ce qui est destiné au paradis des archives ; de l’autre ce qui est voué à disparaître dans le néant des ordures. » 
Qu’est-ce qui compte ? Comment déterminer la valeur d’une chose ? En s’appropriant les affaires d’une inconnue, en les mettant en miroir à sa propre vie, la narratrice nous plonge dans une suite de réflexions et de pensées tour à tour drôles, étranges, poignantes, vertigineuses. C’est finalement l’essence même de notre condition humaine, vouée à la disparition, qui est interrogée dans ce texte sans équivalent et d’une incroyable puissance.

Sans valeur, Gaëlle Obiégly

Je fais partie du jury du Prix du meilleur polar des Éditions Points.
Vous pouvez découvrir ici mon retour sur La cour des mirages de Benjamin Dierstein qui fait partie de la sélection…

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