Un essai de Paul Auster et des photos de Spencer Ostrander pour mieux appréhender le phénomène de la violence par armes à feu aux États-Unis.
J’avais envie de comprendre la fascination exercée par les armes à feu sur les Américains, de disséquer ce comportement qui me paraît sinon dangereux, au minimum inconséquent et qui est pourtant constitutif du droit américain.
Puisqu’en effet, le port d’arme est légalement autorisé par le deuxième amendement de la Constitution américaine : « Une milice bien organisée étant nécessaire à la sécurité d’un État libre, il ne sera pas porté atteinte au droit du peuple de détenir et de porter des armes. »
Bien sûr, je peux comprendre qu’une arme soit indispensable aux militaires, à la police ou même aux tireurs sportifs, je n’y vois a priori aucune objection.
Mais, comment peut-on vouloir faire entrer cet « objet du délire » dans son « home sweet home » – dans le but de « se protéger » disent-ils – avec tous les risques que cet attirail fait encourir à sa famille, à ses enfants ?
Dans l’Utah encore très récemment, on parlait de mettre un cours sur les armes à feu au programme des classes de maternelle ! Oui vous avez bien lu, des maternelles !
La culture des armes à feu a donc encore de beaux jours devant elle… Avoir une arme serait une condition de survie essentielle pour beaucoup d’Américains : environ 393 millions d’armes circulent ainsi dans ce pays.
Si Paul Auster a écrit cet essai concis et non moins précis, c’est que son histoire familiale porte les cicatrices indélébiles de la violence qu’une arme y a engendré. Il a en effet appris sur le tard que sa grand-mère avait assassiné son mari avec un pistolet…
Dans ce livre, il va partir de cette histoire personnelle difficile avant de chercher dans la culture, l’histoire américaine et la constitution, les symptômes du mal qui ronge l’Amérique et qui provoque chaque année des dizaines de milliers de morts.
40000 morts par balle, suicides et homicides confondus ; 80000 blessés. Ces chiffres font froid dans le dos !
Paul Auster complète cet essai argumenté de nombreux exemples de psychopathes de la gâchette qui ont perpétré de véritables carnages sur le sol américain.
Les photographies en noir et blanc de Spencer Ostrander sont le fil conducteur de ce récit : le photographe a immortalisé des lieux de tueries.
Bien qu’il ne s’agisse que de vues de bâtiments, de commerces, d’écoles (en extérieur et parfois à l’intérieur), elles sont glaçantes car ces photos « cliniques » portent une tension palpable, on y cherche les stigmates de la violence passée…
Sorti en 2023, ce livre essentiel me semble plus que jamais d’actualité !
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Résumé :
Qu’est-ce qui fait des États-Unis le pays le plus violent du monde occidental ?
Pour répondre à cette question, Paul Auster retrace des siècles d’usage et d’abus des armes à feu, du déplacement des populations autochtones à l’asservissement de millions d’hommes et de femmes, en passant par la fracture béante entre les pro et les anti-armes, pour finir par les tueries de masse au cœur de l’actualité.
Ponctué des images obsédantes de Spencer Ostrander, qui a photographié les sites d’une trentaine de ces tueries à travers les États-Unis, Pays de sang présente un examen aussi concis que rigoureux de l’Amérique à la croisée des chemins et pose une question brûlante : dans quelle société les Américains veulent-ils vivre ?
Découvrir ma chronique du livre de Magdalena Blažević : À la fin de l’été publié aux Éditions Bleu et Jaune