Ce livre de l’auteur slovaque Peter Balko est une porte ouverte sur un monde fantastique, l’île Ø, territoire fascinant, onirique… peuplé de personnages de roman.
Mais s’il nous parle d’écriture, et même de menaces qui pèsent sur les écrivains (un peu à la manière d’un polar), Peter Balko s’attache aussi à décrire les dysfonctionnements d’une famille bien réelle. La trame de son histoire s’appuie ainsi sur les liens difficiles entre un père et son fils.
Le premier, Jakub Baza, écrivain adulé dans son pays, personnage fantasque, instable, ne vivant que par et pour l’écriture, le second Tichomir, jeune garçon vivotant dans l’ombre de ce père extravagant qui semble absorber toute la lumière pour n’en rien laisser…
Mais ce livre est une porte ouverte et les moyens d’y accéder sont aussi multiples que le niveau de lecture de ce livre totalement inclassable.
Peut-être y a-t-il un moyen de faire se rejoindre ces deux êtres si éloignés l’un de l’autre ?
L’imagination est un terreau fertile et Peter Balko s’y abreuve à plus soif, il nous entraîne dans une histoire où tout semble sujet à interprétation !
Jakub Baza veut absolument rester dans le vrai de l’écriture et il déploie une énergie colossale pour que son fils n’écrive pas de roman d’imagination. Il n’y a que cela qui compte, alors que toute forme d’éducation semble abolie, sans importance, mais vous comprendrez pourquoi en lisant ce livre…
Peut-être est-ce un moyen de résister à la folie dans laquelle l’écrivain semble plonger jour après jour ?
Quelle partie se joue in fine ?
C’est à travers les yeux de Ticho, devenu adulte et romancier, que tout se joue, puisque ce sont ses difficultés d’écriture actuelles qui entraînent la réminiscence dans les souvenirs d’enfance et qui lui permettront peut-être d’accéder aux secrets de son père…
Ce livre est d’une originalité folle ! Il est énigmatique, haletant, à la fois dur et d’une délicatesse folle !
Il faut féliciter le travail de traduction remarquable de Barbora Faure, qui réussit la prouesse de ne pas se perdre dans les jeux de piste de ce roman hallucinant et halluciné… Merci de nous transmettre cette langue si belle et vibrante, ce panaché d’émotions !
En clin d’œil, je suis allée faire quelques photos du livre sur l’île d’Oléron (j’habite dans la presqu’île juste en face) dont le Ø est un symbole typique… J’y ai rencontré une peintre qui utilise ce Ø dans son nom d’artiste. Cette histoire aux multiples facettes semble me poursuivre dans la réalité !
À lire et même à relire pour en comprendre toutes les subtilités !
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Résumé :
Ticho est le fils d’un écrivain à succès qui a progressivement sombré dans la folie. De son enfance, il se rappelle l’isolement de la maison familiale, les errances de son père et les dialogues que celui-ci entretenait avec Roth, le personnage au cœur de son manuscrit, repris sans cesse depuis des années, jamais achevé. Ticho replonge dans ces souvenirs alors qu’il peine à finir son propre roman. Mais au fil de son exploration intime, d’autres choses, plus inquiétantes, émergent, comme cette section spéciale de la police secrète, chargée d’emprisonner les personnages de fiction récalcitrants dans un camp dédié — la mystérieuse Île Ø.
L’ÎLE Ø débute comme un roman psychologique, se poursuit comme une enquête policière flirtant avec le fantastique et se conclut par de surprenantes révélations.

Découvrir une autre chronique aux Éditions Bleu et Jaune : À la fin de l’été de Magdalena Blažević, traduit du croate par Chloé Billon, Prix Tportal du meilleur roman croate en 2023.